Au niveau de notre département, il existe une structure administrative unique en France : l’ORCA ou Organisation Régionale de Concertation sur l’Adoption.
L’ORCA favorise les adoptions d’enfants ou de fratries pupilles de l’Etat pour lesquels la recherche d’une famille adoptive est plus difficile en raison de leur état de santé, de leur handicap ou encore de leur âge.
Malheureusement cette structure demeure peu connue des postulants dans les 4 départements où elle exerce, y compris dans le nôtre où elle est abritée dans les locaux du Conseil Général.
Un peu d’histoire
L’ORCA est née d’une expérience lancée en octobre 1981 en Meuse. Expérience jugée suffisamment satisfaisante pour déboucher en 1991 sur la signature d’une convention qui rassemble aujourd’hui le Ministère des Solidarités et de la Cohésion Sociale et 4 départements : Meuse, Meurthe et Moselle, Moselle et Haut-Rhin. Depuis l’origine, l’ORCA repose sur les compétences, la persévérance, et le sens de la diplomatie de la déléguée ORCA, assistée d’une secrétaire. Avant 2010, il s’agissait de Cornélia BURCKHARDT. Depuis 2010, la déléguée est Annie ROUSSE.
Il est malheureusement incompréhensible de constater après 20 ans de fonctionnement et de si nombreuses réussites que cet exemple régional n’ait pas été développé et généralisé à l’ensemble du territoire. Un seul autre ORCA a vu le jour : en Normandie.
Ces enfants dont l’ORCA s’occupe, qui sont-ils ?
Des enfants dit « à particularité » : enfants grands, souvent de plus de 7 ans, fratries, enfants souffrant de maladies ou de handicaps lourds ou invalidants, nécessitant de fréquents ou longs séjours à l’hôpital, souffrant de retards d’éveil psychologique ou psychomoteur, de problèmes affectifs ou psychologiques, ou encore de maladies dont l’évolution est incertaine.
Pour ces enfants dont les Conseils Généraux des 4 départements précités ont la responsabilité, il est souvent difficile de trouver une possibilité d’adoption dans leur département d’origine. Ils sollicitent alors l’aide de l’ORCA qui va s’efforcer, par sa connaissance des familles prêtes à adopter un enfant présentant ces difficultés, de lui trouver une famille. Ce travail l’amène à entretenir d’excellentes relations et coopérations avec Enfant en Recherche de Famille, qui œuvre au sein d’EFA dans le même but.
Des enfants tous adoptables ?
La première préoccupation de l’ORCA va être d’étudier l’adoptabilité de l’enfant, non au regard des textes juridiques, mais de l’état psychologique de l’enfant, de son vécu, du futur auquel il aspire et des possibilités d’évolution de ceux-ci. Il serait faux en effet de croire que tous les enfants pupilles de l’État souhaitent retrouver des parents même si ceux-ci constituent une majorité écrasante. Il existe diverses situations qui rendent ce choix ni souhaitable ni possible, situations dont le cumul rend l’adoption de plus en plus problématique :
La pré-adolescence et l’adolescence qui sont des moments critiques dans la vie de l’enfant. Périodes où l’enfant construit son autonomie recherche son indépendance de pensées, de choix, de goûts…L’adoption à ce stade entraîne un conflit important dans la construction psychologique. D’un côté l’enfant aspire à l’amour, la sécurité d’une famille, d’un autre il veut être lui-même et par conséquent doit rejeter le modèle parental. Et difficulté supplémentaire, ces périodes durent plus ou moins longtemps et ne se produisent pas forcément au même âge chez tous les enfants.
La maltraitance, physique, sexuelle, psychologique, peut entraîner des séquelles graves amenant l’enfant à provoquer ses parents adoptifs pour les amener à reproduire les comportements dont il a souffert et qui sont pour lui le signe de l’intérêt qu’il suscite, donc de son existence, la matérialisation d’un lien « affectif ». Situation qui entraîne de violentes tensions dans la famille, un sentiment de culpabilité et peut entraîner son éclatement si une aide extérieure n’est pas sollicitée pour poser le problème et trouver des solutions.
L’instabilité engendrée par de multiples placements. Ceux-ci créent chez l’enfant le sentiment que rien de durable ne peut lui arriver, que personne ne peut s’attacher définitivement à lui et par conséquent qu’il ne doit pas s’attacher lui-même pour éviter de souffrir lors de la prochaine séparation.
Enfin un début de deuil non fait de ses parents biologiques et/ou d’accueil, l’idéalisation de ceux-ci, empêche l’enfant de s’attacher à sa nouvelle famille.
Une méthodologie en 5 points
- La première étape consiste pour la déléguée ORCA à parler avec l’enfant de son vécu, son ressenti et non pas à partir du dossier médical et psychologique même parfaitement complété. Ces discussions vont lui permettre de déterminer le niveau de besoin d’une famille, aider l’enfant à s’y projeter et petit à petit passer de cette famille rêvée à la famille réelle qui l’attend.
- La deuxième étape est la recherche d’une famille qui corresponde aux attentes profondes de l’enfant. Profondes et non exhaustives : « les grands veulent tous une famille riche avec une grande maison, piscine, et le scooter à 14 ans ».
- La troisième est la préparation conjointe dans le temps mais séparée dans l’espace de l’enfant qui va devoir passer de la famille imaginaire idéalisée à sa future vraie famille et sentir quand il est prêt à partir ce qui demande un temps plus ou moins long selon l’enfant d’une part, et de l’autre la préparation de la famille adoptante à l’accueil d’un enfant réel forcément différent de l’enfant imaginaire idéalisé.
- La quatrième est « le passage ». Ce moment où l’enfant s’en remet totalement à la déléguée ORCA, en confiance, pour l’emmener vers cet inconnu dont il rêve mais qui comme tout inconnu fait peur.
- Enfin la cinquième, et non la moindre, est l’accompagnement post-adoption. L’enfant est dans sa nouvelle famille et souvent les 6 premiers mois se passent bien, pour le bonheur de tous. Mais souvent plus tard resurgissent des souvenirs traumatisants qui amènent l’enfant à entrer en conflit avec ses nouveaux parents qui sont vite désarmés, l’enfant sachant vite « appuyer là où ça fait mal ». Le soutien que peut apporter la déléguée ORCA dans ces moments devient fondamental, dénouant le vrai du faux, les causes des apparences, remettant les choses à leur juste échelle, orientant si besoin vers des spécialistes et demeurant présente aussi longtemps qu’il le faut bien au-delà des 6 mois réglementaires.
Cet accompagnement est même parfois l’élément qui fait prendre la décision de franchir le pas.
Quelques chiffres
Pour finir par citer quelques chiffres, l’ORCA a facilité l’adoption de près de 150 enfants de 1991 à 2006. Chiffre qui peut paraître faible, mais il ne faut pas oublier qu’il s’agit d’enfants « à particularité » pour lesquels les postulants à l’adoption sont infiniment moins nombreux que pour des enfants très jeunes et en bonne santé. 150 enfants qui ont trouvé le bonheur, sur 5 départements, pour une équipe aussi réduite.
Enfin l’ORCA c’est aussi l’animation de nombreux séminaires de formation en France et en Belgique au bénéfice d’associations comme de travailleurs sociaux.